Nombres magiques des agrégats de silicium

Pour comprendre les mécanismes menant à des structures cristallines, nous avons testé l'effet de la réaction avec l'hydrogène atomique sur les structures contenant un nombre variable 'n' d'atomes de silicium (de 5 à 18 atomes de silicium). Par captures successives de molécules de $ SiH_4$ , nous avons obtenu un ensemble de structures amorphes $ Si_nH_m$ . Pour tous les n possibles, nous avons testé l'influence que pouvait avoir l'hydrogène atomique sur ces structures (Fig 5.13).

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Figure 5.13: Modification des structures après chacune des réactions successives avec un atome d'hydrogène. A gauche les structures initiales. Nous affichons, de gauche à droite, les structures obtenues après chaque nouvelle réaction avec un atome d'hydrogène. A droite nous remarquons que les structures sont mieux ordonnées lorsque le nombre d'atomes de Si est un nombre magique. Si le nombre d'atomes de silicium de la structure est proche d'un nombre magique, nous voyons une structure stable se former et des atomes de silicium qui ne trouvent pas de place dans cette sous-structure stable (par exemple $ Si_{12}H_n$ ).
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En répétant l'investigation par la fonction de corrélation de paires dépendante du temps, nous avons remarqué que certains agrégats prenaient très vite une structure de minimum d'énergie, et n'en bougeaient plus après l'exposition continue à l'hydrogène atomique. C'est notamment le cas pour les structures qui contiennent 4,6,7 et 10 atomes de silicium. En effet, ces structures sont plus stables et l'énergie à fournir pour changer la structure de ces agrégats n'est pas accessible par le simple ajout d'un atome d'hydrogène. Nous pouvons donc déduire que lors de la croissance des agrégats, lorsque leur contenu en silicium est un nombre magique (au sens des nombres magiques des noyaux en physique nucléaire), la structure se place facilement dans une structure de minimum d'énergie. Des travaux portant sur l'étude de la fusion des agrégats de silicium par des méthodes totalement différentes des notres, ont montré que les agrégats ne passaient pas par l'état liquide de façon systématique lorsque la température augmentait. Si la température est trop élevée, les agrégats se fractionnent plutôt que de rentrer en fusion. Les produit de fission des agrégats sont généralement des structures de 6 ou 10 atomes de silicium  [100]. Ces structures, dites magiques, sont en parfait accord avec notre travail. Nos simulations montrent de plus que ces structures de minimum d'énergie, très stables, restent présentes dans un agrégat non magique plus gros. Ainsi, tant qu'une nouvelle structure magique n'est pas formée, les atomes de silicium qui ne sont pas dans la sous-structure magique sont mobiles autour des atomes de silicium d'une structure magique plus petite. Chaque nouvel atome d'hydrogène réagissant avec l'agrégat modifie la position des atomes de silicium qui n'appartiennent pas à la sous-structure stable, qui contient un nombre magique d'atomes de silicium. Ainsi, entre les captures d'atomes de silicium, l'agrégat se place dans des configurations métastables jusqu'à créer un agrégat qui contient une nouvelle structure stable correspondant à un nombre magique plus grand. Nous pouvons donc voir la croissance de structures cristallines comme un passage de structure magique en structure magique.

Autour d'une sous-structure stable, les atomes de silicium excédentaire au nombre magique le plus grand possible ne participent pas à cette structure. Cette structure est donc constituée d'un noyau magique, et d'un atome de silicium qui peut se déplacer autour de ce noyau magique. Les réactions successives avec de l'hydrogène atomique placent les nouveaux atomes de silicium inclus dans l'agrégat qui ne participent pas à la sous-structure stable dans une configuration proche du minimum d'énergie. Au moment où le nombre d'atomes de silicium de l'agrégat devient un nombre magique plus grand, la structure se transforme brutalement (sous l'impact d'un seul atome d'hydrogène) pour adopter la nouvelle configuration magique.

quentin 2007-09-05