Résultats expérimentaux

Le silicium polymorphe s'est révélé un très bon candidat comme matériau de base des cellules solaires. En effet il est moins soumis à une dégradation sous une lumière intense que le silicium amorphe hydrogéné qui est actuellement le matériau utilisé dans 5 % des cellules solaires sur le marché. Le reste du marché est majoritairement constitué de cellules solaire à base de silicium cristallin. Le silicum polymorphe permet d'avoir tous les interêts que peuvent avoir ces deux matériaux. Il est, comme le silicium amorphe, moins cher que le silicium cristallin et parallèlement, il est moins soumis à la dégradation, sous l'effet du rayonnement, que le silicium amorphe. Le silicium polymorphe est constitué d'inclusion de nanocristaux de 2 à 5 nm dans une matrice amorphe [17,18]. Nous l'obtenons par des procédés de dépôts plasma, identiques à ceux qui mènent à l'obtention du silicium amorphe hydrogéné mais dans des conditions proches de la formation des poudres. Les propriétés électroniques du silicium polymorphe dépendent, compte tenu de sa structure hétérogène, de la distribution de tailles et de formes des nanocristaux inclus dans la matrice amorphe. Ainsi, l'étude des nanocristaux qui composent le dépôt de silicium polymorphe est une nécessité dans la mesure où nous voulons comprendre les propriétés que les couches déposées vont avoir. Il faut donc comprendre comment les conditions plasma influencent la formation et les caractéristiques des nanocristaux, c'est-à-dire leur structure, leur taille, leur degré de cristallinité et leur contenu en hydrogène.

Figure 1.1: Nanocristal (à gauche) et poudre (à droite).
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Image tem

Nous savons donc que les nanocristaux sont présents dans les dépôts obtenus dans des réacteurs plasma sous certaines conditions. Cependant ils pourraient aussi bien être formés dans la phase gazeuse qu'au niveau de la surface du dépôt. Des expériences ont été menées pour répondre à cette question. Les particules dans le plasma sont soumises à divers phénomènes. Ils ressentent des effets électrostatiques, des effets de diffusion des espèces ioniques, des effets de diffusion des espèces neutres et un effet particulier appelé la thermophorèse. Cet effet a permis de mettre en oeuvre des expériences qui donnent la preuve que les nanocristaux sont bien formés dans la phase plasma et non pas sur le substrat. Pour comprendre les expériences qui vont être décrites, il faut faire un rappel du phénomène sur lesquelles elles sont fondées : la thermophorèse. La thermophorèse est une force qui apparaît sur les objets qui sont soumis à des collisions avec les molécules ambiantes, lorsqu'il existe un gradient spatial de température [19,20].

La température est une mesure de l'agitation des molécules. Plus la température est élevée, plus l'énergie des molécules est élevée. Donc, quand il existe un gradient de température, il existe un gradient dans l'énergie cinétique moyenne des molécules. Ainsi, un objet placé dans un gaz soumis à un gradient de température, va subir des collisions élastiques, et donc un transfert d'impulsion plus élevé du côté le plus chaud que du côté le plus froid. Cette force est donc fonction de la différence de température et de la taille des particules. Il va donc résulter un mouvement des particules des régions chaudes vers les régions froides. En effet, les particules ont un mouvement résultant de nombreuses collisions et, par conséquent, un mouvement qui n'est plus totalement erratique mais dirigé vers les zones des températures les plus basses. Des expériences de dépôts simultanés sur des substrats de températures différentes ont donc été effectuées. Ainsi, il est possible, à partir de ces expériences, de déduire la présence ou l'absence de particules dans la phase gazeuse du plasma.

Les dépôts issus de ces deux substrats de températures différentes ont été analysés par spectroscopie Raman. Celle-ci permet de déduire la fraction cristalline des dépôts. Les dépôts analysés par spectroscopie Raman pour deux températures de substrat différentes et deux pressions différentes, montrent plusieurs phénomènes que nous allons décrire [21]. On voit sur la figure 1.2 a), que le spectre Raman du substrat refroidit à basse pression (400 mTorr) présente une large bande centrée sur 480 $ cm^{-1}$ qui est caractéristique d'une phase amorphe. Par contre, le spectre Raman du substrat déposé simultanément sur le substrat chaud présente un pic à 520 $ cm^{-1}$ qui est typique de la phase microcristalline. Pour les plus hautes pressions (900 mTorr) nous obtenons un résultat inverse. L'analyse Raman sur la figure 1.2 b) montre un spectre caractéristique du silicium amorphe sur le substrat chaud et présente un pic à 517 $ cm^{-1}$ sur le substrat refroidi. Ce pic est interprété comme étant caractéristique de la présence de nanocristaux nanométriques ce qui a été vérifié par microscopie électronique [22]. Il est donc possible de déduire que les structures qui sont apparues ne sont pas issues de réactions de surface, car il n'existe aucune raison pour que les structures formées apparaissent lors de la mise en place d'un gradient de température dans le plasma. De plus, sur la surface froide, les molécules se collent à l'endroit où elles arrivent. L'agitation thermique ne permet pas, à faible température de surface, de provoquer un mouvement suffisant des molécules incidentes au niveau de la surface. Les molécules incidentes ne peuvent donc pas former une structure de minimum d'énergie en se déplaçant sur la surface. Nous pouvons donc déduire que ces structures sont des nanocristaux propulsés par la force de thermophorèse vers le substrat froid. Ils viennent donc de la phase gazeuse [23].

Figure 1.2: Les mesures expérimentales indiquent que les nanocristaux sont créés dans la phase gazeuse à partir d'une certaine pression car des substrats de différentes températures donnent des spectres Raman différents. Cette différence de résultats peut être comprise en prenant en compte la force de thermophorèse dans le processus de dépôt.
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Ainsi, ces expériences prouvent que les nanocristaux sont formés dans la phase gazeuse, ce qui va orienter notre investigation de la formation des nano-particules par collisions successives avec des molécules du plasma dans la phase gazeuse. Ces molécules peuvent être des molécules de silane, d'hydrogène ou de leurs différents produits de décompositions par les décharges dans le plasma. Ceci est important pour savoir quel type de modélisation va être nécessaire pour comprendre la forme du dépôt en fonction des paramètres du plasma. Pour cela, nous allons faire un tour des possibilités qui nous sont accessibles actuellement.

quentin 2007-09-05